SOPHROLOGIE ET NEUROFEEDBACK : UNE APPROCHE HOLISTIQUE POUR LA SANTÉ DU CERVEAU
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Pascal Le Lay, sophrologue et neurothérapeute, nous fait découvrir sa pratique du Neurofeedback, et en quoi cette discipline est complémentaire des techniques sophrologiques. Un partage passionnant, une méthode à découvrir.
En tant que sophrologue et neurothérapeute, mon parcours professionnel a été marqué par la découverte du Neurofeedback, une technique qui a enrichi ma pratique en sophrologie de manière significative. Dans cet article, je vais expliquer comment ces deux approches dialoguent harmonieusement et en quoi le Neurofeedback prolonge notre accompagnement en sophrologie.
Le point de départ
Ma passion pour la sophrologie a débuté bien avant mon immersion dans le Neurofeedback. Cette approche m’a profondément marqué par sa finesse et sa capacité à accompagner un large éventail de troubles. Aujourd’hui, je réalise combien le fondateur de la sophrologie avait une connaissance approfondie du cerveau et de ses modulations. Le Neurofeedback n’a fait que renforcer le constat du lien puissant entre la posture physique et la posture cérébrale. C’est un dialogue que j’explore quotidiennement avec curiosité, humilité et plaisir.
Un Épisode Déterminant dans l'Évolution de ma Pratique
Un tournant majeur dans mon parcours s’est produit pendant mes fonctions de sophrologue à l’hôpital de rééducation fonctionnelle en Picardie. J’y travaillais avec des patients en rééducation post-AVC, une population complexe nécessitant une approche fine. La sophrologie s’est avérée d’une grande utilité pour aider ces individus à se réapproprier leur corps, mais un défi subsistait : comment évaluer de manière précise et mesurable leur progression ? Ce questionnement m’a conduit à assister à une démonstration particulière. Un kinésithérapeute présentait un exosquelette de rééducation des membres supérieurs, récemment acquis par le service. Le dispositif permettait à un patient de s’asseoir face à un écran, tenant un joystick pour suivre un parcours et dessiner des tracés en se guidant par des repères visuels. L’ordinateur, connecté au joystick, intervenait lorsque le patient éprouvait des difficultés à diriger l’appareil. L’innovation majeure résidait dans la capacité de l’ordinateur à enregistrer le nombre de fois où il reprenait le contrôle, offrant ainsi une mesure quantitative de la progression du patient. Lors de cette démonstration, une idée m’a frappé : « Pourquoi ne pas appliquer un principe similaire au cerveau ? Pourquoi ne pas mesurer l’activité cérébrale de manière quantitative, tant au début du suivi qu’au fil des séances, afin d’observer les progrès ? ». Cette révélation m’a conduit vers le Neurofeedback, une discipline émergente à l’époque. J’ai entrepris une formation sur le Neurofeedback dispensée par des experts canadiens, marquant ainsi le début d’une nouvelle phase de mon parcours professionnel.
Qu’est-ce que le Neurofeedback ?
La technique du Neurofeedback a commencé à se développer dans les années 70. Elle est de plus en plus utilisée dans le champ des pratiques de thérapie, dans le cadre de la psychologie clinique et des neurosciences. On parle aujourd’hui de neurosciences computationnelles, neurosciences qui utilisent les concepts fondamentaux de l’informatique dans la recherche, la démarche scientifique. Dans le cadre de son usage thérapeutique, un équipement technique et des connaissances en psychologie clinique sont bien entendues requises. 5 SOPHROLOGIE ET NEUROFEEDBACK : UNE APPROCHE HOLISTIQUE POUR LA SANTÉ DU CERVEAU Pascal Le Lay, sophrologue et neurothérapeute, nous fait découvrir sa pratique du Neurofeedback, et en quoi cette discipline est complémentaire des techniques sophrologiques. Un partage passionnant, une méthode à découvrir. 6 Le Neurofeedback EEG (par ElectoEncéphaloGramme) utilise un processus d’apprentissage pour entraîner le cerveau à modifier et à réguler son activité cérébrale. Il intègre un dispositif de contrôle qui fournit au patient des informations en temps réel sur l’état de progression de ses acquis. Il prend en considération l’activité du cerveau, ainsi que des aspects comportementaux, cognitifs, et subjectifs. Le Neurofeedback est une procédure sans douleur et non-invasive, méthode qui repose sur des fondations scientifiques et qui a été validée par des études et par la pratique clinique.
La définition officielle approuvée en mai 2008 par le BCIA – l’une des principales organisations professionnelles reconnues dans ce domaine – est la suivante : “Le Neurofeedback est un procédé qui permet à un individu d’apprendre à modifier son activité cérébrale dans le but d’améliorer sa santé et ses performances. Des instruments précis mesurent l’activité des ondes cérébrales, ces instruments retournent en temps réel (feedback), et avec précision, des informations à l’utilisateur. La représentation de ces informations (souvent en relation avec les changements dans les pensées, les émotions et le comportement) montrent les modifications physiologiques souhaitées.”
comment agit le neurofeedback ?
Il permet au patient d’agir directement sur son activité cérébrale, tout en visualisant les résultats et effets de cette action sur un écran. Lors de la séance d’entraînement, l’activité cérébrale est enregistrée tout en donnant un feedback auditif et visuel sous forme de récompense lorsqu’elle correspond à celle choisie lors de l’évaluation. La personne voit en temps réel l’activité électrique de son cortex cérébral sur un écran sous forme de courbe ou de jeu vidéo. À chaque fois qu’elle reçoit un feedback positif par rapport à une tâche, son inconscient enregistre cette réussite et renforce cette activité. De fait le travail se fait tant sur un champ inconscient que conscient. Le fait d’avoir un feedback sur ce qui se passe au niveau inconscient en temps réel permet de le modifier par l’intention. Lorsque nous posons une intention, l’inconscient est capable de se réguler au niveau de la biologie. Sous l’action d’un apprentissage, même tardif, de nouvelles cellules nerveuses vont naître dans certaines régions cérébrales (plasticité cérébrale), de nouvelles connexions vont être établies ou renforcées, tandis que d’autres vont être inhibées. A chaque séance de traitement, le cerveau apprend et la nuit, pendant le sommeil, il intègre l’apprentissage, réalisant ainsi à chaque fois, un progrès vers des mesures d’un fonctionnement moins atypique et plus normatif.
Le Neurofeedback nécessite :
- Une participation active du patient.
- Fait appel au contrôle volontaire et à la concentration.
- Il repose sur un apprentissage conscient.
- Il demande un entraînement régulier.
- Il doit y avoir nécessairement un retour d’informations et une prise de conscience pour qu’il y ait une transformation positive.
La complémentarité du Neurofeedback avec la Sophrologie
Une dimension intéressante du Neurofeedback est qu’il peut accompagner des personnes à priori, n’étant pas à l’aise avec une approche introspective (en raison d’un traumatisme ou de quelqu’autres résistances). En effet, le patient se concentre sur un objet externe (l’écran) tout en obtenant des informations sur son activité cérébrale. Cette combinaison d’attention extérieure et d’introspection permet à de nombreuses personnes de mieux comprendre leur cerveau et d’améliorer leur bien-être. Le focus externe fait référence à l’attention portée par le patient sur des éléments extérieurs, tels que l’écran d’ordinateur lors d’une séance. Le patient est concentré sur des tâches ou des stimulations visuelles ou auditives fournies par le logiciel de Neurofeedback. Cependant, ce focus externe agit comme un leurre conscient qui, en réalité, permet une approche introspective. Le patient se plonge dans une forme d’auto-observation tout en étant concentré sur un élément externe. Le focus interne, en revanche, renvoie à l’attention portée aux processus internes, tels que les pensées, les émotions, et les sensations corporelles. Dans le contexte du Neurofeedback, il s’agit de l’auto-observation de ses propres réponses cérébrales. Cet outil permet d’opérer une transition en douceur entre le focus externe et le focus interne, en aidant les patients à prendre conscience de leur activité cérébrale tout en restant concentrés sur des tâches externes. Cette capacité à combiner focus externe et focus interne est donc particulièrement précieuse pour les personnes qui ont du mal à s’engager dans une approche introspective traditionnelle, leur permettant d’explorer et de réguler les processus internes du cerveau tout en conservant une posture de vigilance externe.
La sophrologie opère une liaison puissante entre le corps et l’esprit, utilisant les sensations corporelles comme levier pour la conscience. En tant que sophrologue, mon rôle se concentre sur la mise en lumière d’une stratégie subtile : en invitant par exemple une personne stressée à modifier sa respiration plutôt que de simplement lui conseiller de se calmer, je guide une transformation consciente au niveau corporel. Ce changement délibéré de rythme respiratoire sert de pivot, initié consciemment, qui exerce une influence directe sur l’activité cérébrale. En captant cette interconnexion intime entre les états physiques et mentaux, la sophrologie se révèle comme une voie vers la modulation cérébrale, offrant des possibilités réelles d’équilibre et de bien-être. Quand il s’agit d’une session de Neurofeedback, le participant est installé confortablement dans un fauteuil, des capteurs d’électroencéphalographie (EEG) minutieusement positionnés sur le cuir chevelu, permettant de mesurer l’activité cérébrale en temps réel. Un écran affiche ensuite des stimuli visuels ou auditifs qui varient en fonction des schémas d’activité cérébrale observés par les capteurs. Par exemple, un exercice peut consister à demander au participant de se concentrer sur une tâche spécifique affichée à l’écran. Pendant ce temps, le système de Neurofeedback surveille les ondes cérébrales, identifiant les moments où des ondes lentes pourraient interférer avec la concentration. Lorsque ces ondes lentes diminuent, le participant reçoit un retour immédiat et positif sous forme de modification des stimuli présentés à l’écran, renforçant ainsi mentalement la posture cognitive propice à la concentration. Cette approche permet au participant de visualiser et de comprendre activement comment ses modèles cérébraux influencent sa concentration. Le Neurofeedback devient alors un outil puissant pour identifier et renforcer les stratégies mentales ou métacognitives (c’est-à-dire « penser sur ses propres pensées ») favorisant une attention soutenue offrant ainsi une méthode tangible pour améliorer la concentration et la focalisation mentale. Dans cette posture, le participant ne peut pas bouger car ceci pourrait altérer la perception du signal électrique. De fait, les stratégies corporelles sont inévitablement délicates. Néanmoins, lorsque le travail de concentration commence à être efficace, je propose souvent d’associer à cette posture de concentration réussie une attention sur une zone corporelle ou bien de faire un geste discret afin de créer un ancrage corporel. Ainsi, le dialogue corps/mental se construit autour d’une bonne posture mentale et le participant peut lorsqu’il est en besoin de concentration réactiver cette posture en faisant son geste d’ancrage.
Conclusion
Neurofeedback et sophrologie forment une combinaison harmonieuse. Elle repose sur la compréhension des concepts de conditionnement opérant, de focus externe et focus interne. Cette combinaison unique permet d’offrir un accompagnement thérapeutique complet, en aidant les patients à comprendre et à réguler leur activité cérébrale tout en maintenant une posture de vigilance externe lorsque cela est nécessaire. C’est une avancée significative dans le domaine de la thérapie et de la rééducation, qui ouvre de nouvelles perspectives pour la santé mentale et le bien-être.
En savoir plus et vous former, rdv le samedi 14 décembre au CEAS Paris.
Pascal LE LAY Sophrologue, Neurothérapeute, sexologue.